ETX90/EC


Disposer d’un télescope facilement transportable mais suffisamment performant est une idée séduisante pour un observateur très occasionnel comme moi. En effet, le Newton (T114/900) acquis voici deux ans a bien peu servi. Le courage a souvent manqué lors des rares nuits claires pour entreprendre le déménagement du matériel sur un terrain adéquat (observer depuis mon jardin est délicat vu la pollution lumineuse engendrée par l’autoroute trop proche). Et que de manipulations pour des observations en général assez peu convaincantes, surtout aux yeux de mes enfants qui ont dû souvent faire preuve d’une sainte patience. Quant à emmener le télescope sous les cieux plus clairs des vacances familiales, pas évident de trouver la place suffisante le jour du grand départ.

Fin 98, mon attention a été attirée par le nouveau Meade ETX-90/EC. Ce petit télescope, compact et performant, venait alors d’être commercialisé depuis peu aux USA : il perfectionnait un modèle renommé pour sa qualité et recevait un accueil très favorable tant dans la presse spécialisée que sur le Web. La disponibilité en Europe a tardé quelque peu et j’ai acquis le télescope en avril 99 (ce ne fut pas simple !) et ai ajouté immédiatement à l’équipement standard un oculaire supplémentaire (Super Plössl 9.7 mm) et une lentille de Barlow (2x). Puis deux mois plus tard, la raquette de commande Autostar (utilisée pour l’alignement du télescope et disposant d’une fonction GOTO), un oculaire Super Wide Angle 13.8 mm et une mallette de transport.

Voici les échos des possibilités de cet étonnant petit télescope, à la lumière de quelques nuits d’observations. Pas de méprise sur les conclusions présentées : si elles paraissent parfois sévères, c’est que selon l’adage " qui aime bien, châtie bien ". Car bien évidemment, le meilleur télescope est celui dont on se sert, et pas celui qui prend la poussière.


A l’utilisation

Plusieurs essais préliminaires furent bien utiles pour se familiariser avec l’engin : installer et régler le chercheur, tester les procédures d’alignement, calibrer les moteurs et découvrir les petites habitudes du télescope puis surtout celles de la raquette de commande Autostar (une surprise parmi d’autres : les longitudes Est sont comptées négativement, ainsi que le fuseau horaire).

Le vrai baptême du feu a eu lieu lors des vacances familiales, en juillet : 2 semaines de camping dans le Tarn et Garonne (France), loin des lumières parasites. Les conditions ne furent pas tout à fait idéales: les journées étaient encore bien longues (ou plutôt les nuits bien courtes), le ciel n’était pas toujours aussi dégagé que souhaité, et les nuits les plus claires se sont passées sous une Lune grandissante. Au total, 6 à 7 nuits ont réellement permis des observations de quelques heures.

Le matériel emporté : l’ETX-90/EC et ses accessoires, une petite boussole, un niveau d’eau de poche, le Multiguide Bordas (" Les plus belles curiosités célestes ", ISBN 2-04-027027-2) et une carte céleste tournante.

Toutes les observations ont été faites en mode altazimutal, avec l’Autostar pour le suivi des objets.

Voici la procédure d’alignement utilisée :

  1. Installer le télescope sur une table horizontale bien stable (une petite table ronde et bien lourde empruntée au bar du camping a fait parfaitement l’affaire; une table de camping peut convenir mais on y perd en stabilité).
  2. Orienter le tube horizontalement selon l’azimut Nord.
  3. Sélectionner le site d’observation (connu via latitude, longitude, heure d’été, fuseau horaire), introduire la date et l’heure.
  4. Effectuer l’alignement en choisissant deux étoiles bien séparées (en général Arcturus et soit Véga soit Altaïr) et les amener successivement au centre du chercheur et de l’oculaire avec l’Autostar.

Le tout prend quelques minutes. Le télescope est alors aligné et la raquette de commande Autostar peut être utilisée de façon à pointer un objet de son catalogue (objets du système solaire, constellations, objets du ciel profond, étoiles…) via la fonction GOTO; si l’alignement n’a pas été trop mauvais, l’objet demandé apparaît en général dans l’oculaire, sinon dans le chercheur ou à proximité. Le suivi se fait automatiquement. La mise à température a toujours été fort rapide (une dizaine de minutes).

Que voir ?

La Lune, bien entendu : superbe, même au plus fort grossissement (SP 9.7 + Barlow = 258x) ; je suis convaincu qu’on peut monter encore en puissance en l’absence de turbulence. Très joli : le SWA 13.8 permet de voir la Lune en entier à un grossissement de 90x.

Vénus : le croissant est parfaitement distingué même aux plus faibles grossissements.

Mars : un peu décevant : aucun détail discernable (voir ci-après).

Jupiter et Saturne : magnifiques (…mais il a fallu veiller tard).

Le ciel profond : plusieurs objets sont bien visibles dont M13 (assez diffus), M92 (petit mais net), M11, M27 (splendide), M29, M39, M8 et encore bien d’autres… Les oculaires SP 26 et SWA 13.8 donnent ici les meilleurs résultats. Quel plaisir de découvrir miraculeusement dans l’oculaire des objets invisibles à l’oeil nu !

Les étoiles doubles colorées : image toujours très nette, avec des couleurs bien définies ; pas d’aberration particulière à mentionner.


En conclusion (1) : les coups de cœur

La transportabilité : une mallette de 50 cm x 40 cm x 25cm suffit, pour un poids total d’à peu près 4 kg ; de quoi supprimer toute hésitation à emporter l’engin avec soi n’importe où, avec la certitude de l’aligner en un minimum de temps ; attention cependant : un support convenable (table…) doit être disponible sur place ou être emporté (table ou trépied).

Les oculaires : le Super Plössl de 26 mm livré en standard est très agréable à utiliser ; le Super Wide Angle de 13.8 mm est mon favori ; le Super Plössl de 9.7 mm donne d’excellents résultats pour la Lune, y compris avec la Barlow ; dommage que le SP 26 ne soit pas parafocal avec les autres oculaires de la même série : une mise au point plus que légère est nécessaire.

Les possibilités de l’Autostar : c’est pour moi un outil extraordinaire de découverte du ciel car il met à la portée de chacun les objets souvent insoupçonnés et ceci avec une étonnante facilité ; si un accessoire fait bien de l’ETX le télescope de chacun (ETX=" Everybodys’s Telescope "), c’est bien lui.

La vision des objets planétaires : l’ETX est particulièrement à l’aise avec ceux-ci : la Lune est superbe, même aux plus forts grossissements, Jupiter et ses satellites sont bien nets, Saturne et son anneau idem; Vénus et ses phases bien identifiables ; Mars m’a déçu un peu, sans doute parce que déjà basse sur l’horizon avant que le ciel soit assez noir, d’où turbulences.

La mallette de transport : bien conçue, tout y est à sa place et bien protégé dans un volume réduit ; attention : elle n’est pas véritablement antichoc et la fermeture à clé est dérisoire.

Le look enfin : très réussi. Le télescope attire pas mal de curieux, tous très surpris de voir ce qu’un aussi joli petit engin peut montrer.


En conclusion (2) : les " peut mieux faire "

Le bruit: si le suivi d’un objet se fait de façon relativement silencieuse, le pointage de l’objet s’accompagne d’un bruit évoquant celui d’un ouvre-boîtes électrique; pas très discret, et même gênant pour les éventuels voisins ; les premières nuits furent écourtées à cause de ce détail.

Le chercheur: il oblige à faire d’inconfortables contorsions et gêne le placement de l’oeil devant l’oculaire ; il est même inutilisable dans certaines positions (objet proche du zénith) ; un chercheur coudé serait bien meilleur; celui-ci existe (8x25) mais n’est pas livré en standard et hélas amène d’autres problèmes : le réticule est trop large et la mallette de transport ne se ferme plus une fois le chercheur placé… ; heureusement, le chercheur n’est que peu utilisé vu l’Autostar.

La luminosité : 90 mm d’ouverture c’est un peu juste, surtout pour les objets du ciel profond ; un modèle 125 mm est prévu dans peu de temps, mais alors quid du poids et de la portabilité ; à noter cependant que l’ETX me paraît plus lumineux que mon T114/900.

L’autonomie: 20 heures d’autonomie constatée avec 8 piles AA, c’est peu et pas très économique; bien sûr, l’euphorie de passer d’un objet à l’autre a probablement mis les moteurs plus à contribution que la normale ; compter 40 heures maximum…au bout desquelles les piles ne seront pas vraiment à plat mais l’Autostar devient capricieux en deçà de 75% de charge.

La mise au point : elle se fait via une mollette sur la base du tube ; ce qui n’introduit pas trop de vibrations ; mais la mollette est inutilisable si l’objet visé est proche du zénith ; c’est gênant lors du changement d’oculaire ou d’utilisation de la Barlow : il faut alors déplacer le centre de visée, remettre au point puis revenir à l’objet visé ; c’est finalement assez simple avec l’Autostar (via un GOTO vers la dernière position) ; la mise au point électrique est promise mais pas encore disponible.

Le confort d’utilisation : placer le télescope sur une table ne permet pas de longues et confortables observations et encore faut-il en prévoir une ; un trépied est disponible, mais diminuera la portabilité dans des proportions encore à déterminer.

La précision du suivi : les moteurs produisent un entraînement approximatif seulement : il ne faut pas espérer suivre un objet plus de quelques minutes (mon maximum est de 30) selon la précision de l’alignement initial du télescope ; pas question de rivaliser ici avec un LX200 de la même marque…et c’est tout à fait normal vu la gamme de prix.

Les possibilités photo : la rapport élevé F/D (donc un long temps de pose) et le suivi approximatif laissent perplexe quant à l’utilisation pour la photo du ciel profond ; pour les planètes, ça devrait être acceptable ; diverses options d’adaptateur pour appareil photo ou CCD sont proposées mais n’ont pas été expérimentées.

La fragilité: le blocage en déclinaison se fait par une mollette et un système de friction ; c’est sûrement un point faible potentiel (risque de bris de la mollette ou de l’axe si serrage trop prononcé).

Fiche Technique ETX-90/EC

(illustré ici avec l’Autostar)

etx90
  • Produit par: Meade (Irvine, CA, USA)
  • Type : Maksutov-Cassegrain
  • Diamètre 90 mm, Focale 1250 mm (F/D=13.8)
  • Dimensions : 380 mm x 180 mm x 220 mm
  • Poids : 3.5 kg
  • Monture à fourche motorisée selon les 2 axes
  • Trépied de table pour suivi en mode équatorial
  • Chercheur : 8x21
  • Oculaires : coulant 31.75mm (Super Plössl 26 mm livré en standard)
  • Raquette de commande standard : 4 vitesses, suivi possible en mode équatorial
  • Raquette de commande optionnelle Autostar : 9 vitesses, suivi possible en mode altazimutal ou équatorial; pointage automatique vers un objet
  • 8 piles AA assurent environ 40 heures d’autonomie



  ETX-90/EC : un an après ...


Quelques sites Web utiles

Un rapport de test de la revue Sky&Telescope :
www.skypub.com/resources/testreports/telescopes/9905testreport.html

Le site Meade (avec la description des produits et les manuels on-line) :
www.meade.com

Une incontournable source d’informations indépendantes, mise à jour plusieurs fois par semaine :
www.weasner.com/etx




Pierre Henrotay est membre du G.A.S depuis 1997
Contact et informations complémentaires : Pierre Henrotay



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