Les mystères de Platon
Par Charles A. Wood 
Traduction: Alexandre Lhoest
e cratère Platon est une
des grandes vedettes de la
surface lunaire. Avec ses 101 km de
diamètre, c’est un des plus grands cra-
tères de la lune et il séduit avec son sol
particulièrement sombre et lisse, cerné
par un bord clair. Il a été le sujet de
nombreuses études et il fut longtemps
le sujet de spéculations et de polémi-
ques. L’observation de Platon à travers
un télescope est particulièrement intri-
gante en raison de l’irrégularité de ses
remparts, comme le montrent les varia-
tions de longueur des ombres projetées.
Voir par exemple la photo ci-dessous
réalisée par un observateur du GAS.
Ces ombres changent de longueurs
en
quelques heures seulement. Selon de
@photo O.Meeckers
vieilles mesures rapportées dans le livre 
« The Moon » par Thomas Gwyn Elger,
(1895) trois sommets du rempart culmi-
nent à 1.5, 1.8 et 2.1 km (par rapport au
niveau de sa base).
Sur le bord ouest du cratère, on trouve
un grand massif triangulaire qui s’est dé-
solidarisé partiellement du rempart. Ce
bloc long de 15 km, ainsi qu’un autre
plus au nord, sont le résultat d’un gigan-
tesque glissement de terrain durant le-
quel des parties du rempart ont glissé en
avant, créant comme une morsure dans
le bord circulaire du cratère. Les varia-
tions en largeur et hauteur
de rempart à
l’ouest peuvent donc être liées à cet ef-
fondrement, mais les différences de hau-
teur sur le bord est de Platon sont
d’origine plus ancienne et inconnue.
  
Une des particularités, facile à expliquer,
de Platon est son absence de pic central.
Comparé à
d’autres cratères
de taille
semblable, Platon
devrait en effet
avoir une
montagne de 2.2
km s’élevant en
son centre.
Cependant, puis-
que Platon est
rempli d’une
couche de 2.6 km
de lave, le pic est
enterré.  
Pendant plus de
cent ans, la surface si particulière du cra-
tère Platon a été le centre d’intenses dé-
bats sur de possibles changements se
produisant sur la lune. Trois types
d’observations ont causé la controverse :
la découverte de petits cratères, la varia-
tion d’intensité
lumineuse du sol en
fonction de l’inclinaison du Soleil et
l’obscurcissement du sol lui-même.Parce
que le fond du cratère possède quelques
petits cratères d’impact à la limite de ré-
solution des petits télescopes, il y a eu
des concours pour détecter le plus grand
nombre de cratères. Le professeur
d’astronomie de Harvard W.H. Pickering
a apparemment gagné en 1892 en an-
nonçant sa cartographie de 71 taches
dans Platon ! La comparaison de cartes à
main levée avec des photographies à
haute résolution obtenues par le vaisseau
spatial Lunaire Orbiter 4 en 1967 dé-
montre que les observateurs ont détecté
les quatre plus grands cratères, et quel-
ques-uns des plus petits, mais leurs éva-
luations de leurs localisations, de leurs
tailles et de leur nombre étaient souvent
sérieusement erronés !
Combien de petits cratères comptez-vous
dans Platon sur l’image de Olivier
Meeckers ? Bien que quelques observa-
teurs en aient rapporté des douzaines,
seulement quatre cratères sont suffi-
samment évidents pour être vus avec des
télescopes modestes et ce lorsque les
conditions d’observation sont stables et
l’angle d’illumination favorable. Le plus
grand des quatre mesure 2.2 km de dia-
mètre.
Les cratelets n’étaient pas la seule source
de controverses. Selon Elger,
«
l’assombrissement graduel du sol de
Platon lorsque l’altitude du soleil passe
de 20° jusque après la pleine lune doit
être considérée comme un fait établi,
bien qu’aucune hypothèse réaliste n’ait
été avancée pour l’expliquer ». En fait,
selon des mesures de la luminosité du
sol par photomètres sensibles montés
sur les grands télescopes, c’est le
contraire qui est correct ! Comme le
reste de la Lune, le sol de Platon
s’éclaircit à l’approche de la pleine
lune, ensuite devient rapidement beau-
coup plus lumineux, et puis s’assombrit
après la pleine Lune.
La troisième polémique à propos de
Platon concerne des rapports stipulant
que le sol sombre est parfois obscurci
par des brumes ou des « nuages »…
Précisons que la plupart des observa-
tions ont été faites au 19
ème
siècle; le li-
vre de Walter Goodacre de 1931, aussi
appelé «The Moon », mentionne qu’il y
a « un nombre de cas bien authenti-
fiés ». Les descriptions mentionnent un
brouillard qui s’est dissipé à la montée
du Soleil, « une curieuse sorte de lueur
blanche et lumineuse », avec un man-
que remarquable de détail. Un autre ob-
servateur du 19e siècle a trouvé que le
sol était couvert par des myriades de
points de lumière, « comme si  reflété
par des nuages floconneux étendus près
de la surface ».
Par contraste avec ces observations vi-
suelles, aucun assombrissement du sol
de Platon n’a été vu sur aucune des
nombreuses photographies prises par
les sondes spatiales ou par les grands
télescopes. Peut-être est-ce comme
pour les OVNIs, seuls ceux qui y
croient les voient…
L



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